LES MéTHODES DU DéVELOPPEMENT

DE LA FORCE

 

Figure 18 : Les méthodes de Zatsiorski

 

Pour Zatsiorski pour développer la force il faut créer dans le muscle des tensions maximales. Ceci peut s'obtenir de 2 manières :
- avec charge maximale
- sans charges maximale mais jusqu'à la fatigue ou à vitesse maximum.

Ces différentes méthodes présentent des avantages et des inconvénients qui sont décrits sur le tableau 19.

(((
Méthodes répétitions séries récupé. Avantages inconvénients

action sur les charges lourdes
efforts facteurs nerv.: récupération
maximaux 1 à 3 4 à 7 7mn synchronisation longue entre
sur organisme les séances
frais

action sur répétitions
efforts 5 à 7 6 à 16 5mn facteurs nerv. efficace sur
répétés et sur la masse organisme
musculaire fatigué

action sur les peu d'action
efforts facteurs nerv. sur la force
dynamiques 6 à 15 10 à 30 3 mn action sur la
montée en
force
)))

 

I. LES RéGIMES DE CONTRACTION

Il existe 4 régimes de contraction :
- isométrique
- anisométrique concentrique
- anisométrique excentrique
- pliométrique
+ l'électromyostimulation.

 

1.1. Le régime concentrique

étudié de manière exhaustive par Delorme et Watkins, il a été clairement résumé par Zatsiorski qui a décrit ces 3 méthodes. Longtemps la musculation a fonctionné sur ce seul paramètre : toute la musculation classique était concentrique.

 

Données physiologiques :

Pour être efficace en concentrique, il faut tenter de synchroniser volontairement les unités motrices. On ne dispose d'aucune aide extérieure (comme dans le cas de la pliométrie où la synchronisation est imposée par le milieu).
Sur la figure 20 Bosco (1985) montre comment pour la même performance de détente exécutée en concentrique (Squat Jump) et en pliométrie (Counter Movement Jump) l'activité électrique du muscle est nettement supérieure dans le cas du travail concentrique : le "concentrique" est donc favorable à un travail volontaire intéressant en période de compétition.

Figure 20 : Activité électrique en squat jump et en CMJ pour la même élévation du centre gravité

 

Les méthodes concentriques :

Figure 21 : Les méthodes concentriques

 

Sur la figure 21 sont indiquées les méthodes les plus efficaces du régime concentrique.


La méthode bulgare
: Nous appelons "méthode bulgare" la méthode qui consiste dans la même séance à utiliser des charges lourdes et des charges légères exécutées rapidement (c'est une méthode par contraste).

ex
:   
1 X 6 à 70%
          1 X 6 à 50% à vitesse maximum

Par extension nous avons introduit la méthode bulgare dans la série qui consiste à alterner dans la même série des charges lourdes et des charges légères ce qui suppose de modifier la charge pendant la série.

ex
:
    2 répétitions à 70%, puis 2 à 50%, puis 2 répétitions à 70%, puis 2 à 50%

 

La méthode de la pyramide dans la série : Elle suppose également une modification de la charge au cours des répétitions.

ex :    3 répétitions à 50%, 2 répétitions à 60%, 1 répétition à 70%    
          2 à 60%, 3 à 50% enchainées

 

La pré et la post-fatigue : La pré-fatigue consiste à fatiguer un muscle de façon analytique (pour le quadriceps par exemple sur une machine à quadriceps) et d'effectuer un mouvement plus global (ici le squat). On peut ainsi mieux localiser l'effort des squats sur les quadriceps.
La post-fatigue consiste à inverser le processus : d'abord les squats puis la machine à quadriceps.

 

Le travail volontaire : Il s'appuie sur le principe illustré par la figure 15 : un effort comportant uniquement une phase concentrique est plus "coûteux" sur le plan nerveux. C'est donc un effort favorable pour préparer "nerveusement un athlète à s'investir "volontairement". Cette méthode est efficace en période de compétition.

ex :     En développé couché, avec une charge de 60%, descendre, poser la barre sur la poitrine puis, après un relâchement                           musculaire, pousser la barre de façon explosive.

 

1.2. Le régime isométrique

Ce sont Hettinger et Muller en 1953 qui ont exploré les premiers ce type de travail. Alors qu'ils obtinrent des résultats très spectaculaires, l'isométrie a ensuite pratiquement disparu des salles d'entraînement tellement cette méthode et son efficacité ont été contestées.

 

Bases physiologiques :

Connue pour ne pas développer la masse, l'isométrie présente l'intérêt de permettre à l'athlète de développer des tensions volontaires supérieures à son maximum concentrique (Schmidbleicher parle de 10%) ; Duchateau sur l'adducteur du pouce a montré que le travail isométrique était plus favorable que le travail concentrique à charges légères pour augmenter la force des fibres rapides. Zatsiorki mentionnait déjà (1966) que le gain de force dû à l'isométrie était spécifique de la position de travail (à plus de 20° de cette position la force n'avait pas évolué). Il existe donc d'après Sale une composante nerveuse prépondérante dans le travail isométrique. Pour Monnot un effort isométrique soutenu pendant quelques secondes entraîne une augmentation de la synchronisation des unités motrices en cours d'exercice.

 

Les méthodes isométriques :

Figure 22 : Les principales méthodes intégrant l'isométrie

 

Nous retiendrons 2 méthodes principales intégrant l'isométrie:

Le principe de l'isométrie jusqu'à la fatigue totale : Il consiste à prendre une position à la maintenir jusqu'a l'épuisement complet.

ex : En squat,
avec une charge de 60 à 90%, tenir la position genoux fléchis à 90°.

Cette méthode est toujours couplée avec du concentrique

ex :    1 répétition en isométrie jusqu'a la fatigue à 80%    
          2 répétitions en concentrique à 50%
   
       1 répétition en isométrie jusqu'a la fatigue à 80%
   
       2 répétitions en concentrique à 50%

La méthode stato-dynamique : Elle doit son nom au fait que le mouvement s'effectue avec une phase statique qui se greffe sur un mouvement concentrique.

ex :  En squat, avec une charge de 60%, descendre normalement, remonter et s'arrêter 2 secondes genoux fléchis à 90°, puis finir le 
        mouvement de façon explosive. On effectue 6 fois 6 répétitions. Cette méthode est très efficace en période de compétition.

 

 

1.3. Le régime excentrique

Les données physiologiques :

Elles portent sur la récupération du travail excentrique et sur les incidences sur la structure du muscle.


La récupération
:

Le schéma de Talag montre la chronologie de la récupération des 3 types d'efforts.

Figure 23 : Les courbatures suite à un effort excentrique (d'après Talag 1973)

 

Les perturbations musculaires :

Le travail excentrique est connu pour entraîner des lésions profondes dans le muscle :

* Au niveau de la Strie Z on constate selon l'intensité du travail :

- soit un épaississement

- soit une ondulation de la strie Z

- soit carrément une rupture

* Au niveau des fibres on constate un grand nombre de fibres nécrosées surtout des fibres de types II selon certains auteurs.
   Au cours de la récupération on observe par contre une prolifération de cellules satellites signes selon certaines chercheurs d'une       régénération des fibres.

* Au niveau des myofibrilles on note une destruction importante.

* Le tissu conjonctif est également atteind

* Enfin un rapport hydroxyproline-créatinine (Gobelet) augmenté témoigne d'une atteinte de la liaison tendon-muscle.

Figure 24 : Influence du travail excentrique sur le muscle

 

Ces profondes altérations doivent nous faire appréhender le travail excentrique avec prudence, ce qui veut dire :

- toujours coupler l'excentrique avec du concentrique.

- veiller à ménager une récupération assez longue entre le travail excentrique et la compétition.

 

Les méthodes excentriques :

Figure 25 : Les méthodes excentriques

 

Donnons 2 exemples :

La méthode excentrique + concentrique : Elle consiste à effectuer 4 répétitions en excentrique à 100% (en développé couché par exemple l'athlète freine la descente et des aides lui remontent la barre) et à enchaîner 6 répétitions en concentrique à 50%.

Le 120-80
: Cela consiste à descendre une charge de 120% et à remonter une charge de 80%. Cela suppose du matériel qui peut avoir 2 allures :
- soit une bricolage (figure 26) qui permet un allègement
- soit une machine du type "portique" programmable qui permet de remplacer les poids par un moteur et ainsi de changer de charge automatiquement.

Figure 26 : Le 120-80

 

Figure 27 : La machine "Bérénice" permettant de programmer les variations de charges à volonté

 

 

4.1. Le régime pliométrique

Données physiologiques :

Ce sont celles qui concernent l'étirement musculaire.(pour plus de renseignements voir "la pliométrie" ouvrage disponible à l'UFR STAPS de Dijon)

Méthodes pliométriques :
Nous avons retenu trois exemples :
- La pliométrie simple :
Elle est illustrée par les bondissements (foulées bondissantes, sauts à la corde, plinth bas (20 cm), bancs, etc...)
- La haute pliométrie :
Elle s'effectue avec des plinths hauts (60 à 100 cm).

Pour varier nous avons vu qu'elle peut s'exécuter avec différentes flexions de jambes : petite flexion 130°, moyenne flexion 90° et grande flexion 60°. Il est bon dans la même séance de combiner ces différentes exécutions : la figure 29 illustre une possibilité de combinaison.
Nous voyons donc que dans une même séance nous pouvons faire un seul type de flexion (on parle dans ce cas de méthode analytique) ou alors combiner 2 ou 3 angles de travail (méthode combinée)

- La pliométrie avec charge : Elle consiste à exécuter des squats par exemple en introduisant un ou plusieurs temps de ressort.

5.1. L'électromyostimulation

Technique introduite dans le domaine de l'entraînement par Kotz (URSS) en 1970, elle a été reprise principalement au Canada par Portmann. Nous avons commencé à l'utiliser en France de façon systématique. Nous illustrerons nos travaux avec l'exemple du quadriceps. La position de travail du quadriceps est représentée sur la figure 30 .L'athlète travaille contre une résistance isométrique.

Figure 30a : La stimulation du quadriceps

 

La position des électrodes est représentée sur la figure 30 b. On constate une électrode supérieure de grande taille recevant les pôles négatifs et deux électrodes inférieures recevant les 2 pôles positifs.

Pour être efficace, le travail en électrostimulation doit s'effectuer avec l'intensité de travail maximum supportée par l'athlète. A titre indicatif la figure 31 rapporte la force maximum développée sous stimulation seule, exprimée en pourcentage de la force maximale volontaire.

Figure 30b : La position des électrodes pour la stimulation du quadriceps

 

Figure 31 : La force maximale obtenue par électrostimulation par différents auteurs

 

Les progrès en force mesurés au "BIODEX" sont de l'ordre de 30 % pour 3 semaines de travail à raison de 3 séances de 10 mn par semaine pour un quadriceps. La figure 32 compare nos résultats avec ceux de la littérature.

Figure 32 : Progrès en force après un cycle d'électrostimulation

 

Nous ne parlerons ici que de l'effet de l'électrostimulation sur la masse musculaire et la détente.

La masse musculaire mesurée par scanner informatisé évolue de manière très significative en 9 séances sur 3 semaines pour le biceps brachial et le quadriceps. La figure 33 montre les progrès en pourcentage de la masse musculaire. il faut noter que pour le quadriceps un groupe témoin travaillant en contraction volontaire n'a pas obtenu de gains comparables.

 

Figure 33 : Les gains en masse musculaire pour 2 muscles à l'issue de 3 semaines de travail en électrostimulation, mesurés au scanner

 

Pour la détente, chez des sauteurs en hauteur de niveau moyen, nous avons effectué 3 semaines d'entraînement avec 2 groupes :
- un groupe s'entraînait de façon classique
- un groupe s'entraînait de la même façon avec en plus 3 séances par semaine de 10mn de stimulation du quadriceps.

Les résultats en force du quadriceps (mesurés au Biodex), en Squat Jump et en CounterMovement Jump sont représentés sur la figure 34.

Figure 34 : Résultats aux tests de 2 groupes de sauteurs en hauteur

 

On constate des progrès significatifs en force et en performance au Squat Jump.
Par contre, le CounterMovement Jump a tendance à baisser. L'élasticité musculaire a donc tendance à diminuer au cours d'un travail d'électrostimulation ; il faut donc compenser avec des exercices de pliométrie.

 

Conclusion :
Nous considérons que l'électrostimulation est une méthode intéressante :
- comme méthode principale pour remplacer la musculation lourde
- comme méthode complémentaire
- pour maintenir le niveau de force en période de compétition
- pour repousser le seuil de fatigue musculaire dans le cas des disciplines d'endurance
- pour augmenter la masse musculaire

Mais il faut intégrer cette méthode dans le programme des athlètes avec les autres régimes de contraction.

 

 

II. L'ALTERNANCE DES RéGIMES DE contraction

L'idéal pour la musculation moderne consiste à alterner les régimes de contraction.
Ceci apparaît clairement sur ce schéma d'une expérience de Viitassalo.

Figure 35 : Expérience de Viitassalo

 

Il a fait 5 groupes s'entraînant différemment et il a testé les gains de force maximum.
Le premier groupe s'est entraîné 75% en excentrique 25% en concentrique.
Le deuxième 50% en excentrique 50% en concentrique.
Le troisième uniquement en concentrique.
Le quatrième uniquement en bondissements.
Et le cinquième en bondissements allégés (c'est-à-dire avec des élastiques suspendus au plafond).

On constate une efficacité plus grande du groupe 50% excentrique 50% concentrique par rapport au groupe 100% concentrique.

Ce principe de travail va pouvoir s'appliquer à 2 niveaux :
- dans la séance : on enchaîne des séries de régimes de contraction différents
- dans la série : on effectue des répétitions avec des contractions différentes dans la même série.
  La figure 36 montre l'inventaire de toutes les combinaisons possibles. La musculation moderne explore l'efficacité de ces différentes   possibilités.

Figure 36 : Les différentes combinaisons de régimes de contraction

 

 

III. LA PLANIFICATION DES EXERCICES DE FORCE

Dans la séance :

Nous considèrerons 2 types de séances :
- les séances destinées à développer la force maximale où l'athlète ne travaille qu'avec les barres
- les séances destinées à développer la force spécifique aux différentes disciplines où l'athlète alterne des exercices avec charges lourdes et des situations spécifiques (figure 37).

Les séances actuelles sont souvent des séances construites sur la base d'un enchaînement des différents régimes à l'intérieur même de la séance.

Figure 37 : Exemples d'enchaînements effectués pour développer la force spécifique

 

Dans la semaine :

Il est souhaitable d'alterner les exercices de musculation avec les exercices techniques ou la course. En effet, la musculation sollicite les articulations de manière intense et il est bon le lendemain de faire fonctionner ces éléments de manière plus relâchée.

 

Dans le cycle :

La durée idéale du cycle est aujourd'hui de 3 semaines pour les disciplines de force explosive. La figure 38 illustre le profil des 3 semaines.

Figure 38 : Le profil du cycle de travail (d'après Tchiene)

 

La première semaine est effectuée au maximum des possibilités d'entraînement, c'est-à-dire a 100%.
La deuxième semaine diminue en volume de travail pour ne comporter que 80% de la quantité de travail de la première semaine.
La troisième semaine est constituée d'un repos relatif à 30% du volume de travail avec la plupart du temps des tests.

 

Le bloc :

Cette notion introduite par Vercoshanski consiste à mettre l'accent sur une qualité physique pendant un temps assez long. Pour nous, le bloc correspondra à 2 cycles (figure 39).

 

Figure 39 : Le bloc

 

On alternera ainsi des blocs de "force" et des "blocs" techniques.

 

La période :

Elle est constituée par un bloc de force et un bloc technique suivi des compétitions.

 

Figure 40 : La période (G. Cometti, les méthodes modernes de musculation)

 

L'année :

Figure 41 : La planification de l'année en "double périodisation"

 

Avec Verchosanski on parle aujourd'hui de "double périodisation".

 

L'alternance des régimes de contraction :

La planification moderne consiste à alterner les méthodes et les régimes de contraction au cours de l'année en tenant compte des effets respectifs des différentes méthodes.

La figure 42 représente la planification sur une demi-année d'un lanceur de poids de niveau national. On voit évoluer les régimes de contraction en fonction de la période.

Figure 42 : Planification d'une demi-année d'un lanceur de poids

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